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Xarelto°, Pradaxa°, héparines orales : précautions d'emploi

06-07-2013

Introduction :

Les nouvelles héparines orales arrivées sur le marché ont modifié la pratique quotidienne du suivi des patients sous anticoagulants et, si elles apportent un confort certain dans le mode de prescription, il existe  des particularités à connaître, selon le type de molécule, au niveau des bilans d'hémostase, de même que dans les risques de surdosage en cas d'insuffisance rénale ou dans certaines interactions médicamenteuses.

Indications :

1) Prévention des AVC et embolies systémiques chez patients adultes atteints de fibrillation atriale non valvulaire et présentant 1 ou plusieurs facteurs de risque

- Xarelto° : 20 mg en une seule prise par jour ou 15 mg en une seule prise par jour en cas d'insuffisance rénale modérée (clairance de la créatinine estimée selon la formule de Cockroft et Gault (CLCR) de 30 à 49 ml/mn)

- Pradaxa°: une gélule de 150 mg deux fois par jour (matin et soir) ou une gélule de 110 mg 2 fois/jour pour les patients > 80 ans ou IR modérée (CLCR de 30 à 49 ml/mn)

2) Traitement des thromboses veineuses profondes (TVP) et prévention des récidives (TVP ou embolie pulmonaire) suite à une TVP aigüe chez l'adulte

- Xarelto° : 15 mg 2 fois/jour pendant les 3 premières semaines puis 20 mg en une seule prise par jour ou 15 mg en une seule prise par jour si insuffisance rénale modérée (CLCR de 30 à 49 ml/mn)

3) Prévention des événements thromboemboliques veineux chez les patients adultes bénéficiant d'une intervention chirurgicale de la hanche ou du genou

- Xarelto° : 10 mg en une seule prise par jour

- Pradaxa°: 2 gélules de 110 mg en une seule prise ou 2 gélules de 75 mg en une seule prise pour les patients >75ans ou avec IR modérée (CLCR de 30 à 49 ml/mn)

Evaluation de la fonction rénale chez les patients traités par nouveaux anticoagulants :

Avant toute prescription de dabigatran ou rivaroxaban, l’évaluation de la fonction rénale par la formule de Cockcroft et Gault doit être réalisée.

D’autres formules recommandées pour l’évaluation du débit de filtration glomérulaire (CKD-EPI ou MDRD), sont considérées comme de meilleurs estimateurs de la fonction rénale, mais la formule de Cockcroft et Gault présente dans le cas des anticoagulants deux avantages essentiels :

1) C’est la formule qui a été utilisée dans les essais cliniques

a) pour sélectionner les patients : exclusion si la clairance estimée de la créatinine est < 30 ml/mn,

b) pour ajuster les posologies : pour exemple, 110 mg deux fois par jour en dessous de 50 ml/mn au lieu de 150 mg deux fois par jour au dessus de 50 ml/mn en cas de fibrillation atriale,

c) pour évaluer l’impact de la fonction rénale sur le risque hémorragique et thromboembolique,

2) Avec la formule de Cockcroft et Gault, les valeurs de clairance de la créatinine au- delà de 75 ans sont systématiquement plus basses que les valeurs obtenues avec la formule de MDRD ou CKD-EPI.

Ainsi les ajustements posologiques et les précautions d’emplois selon la fonction rénale seront plus fréquents avec la formule de Cockcroft et Gault et pourraient contribuer à une prescription du dabigatran et du rivaroxaban plus sécurisée notamment chez les sujets âgés.

Pour ces raisons, c’est donc la formule de Cockcroft et Gault qui doit être utilisée pour la prescription de ces molécules.

Dans la mesure où la fonction rénale peut varier au cours du temps chez un même malade, il est recommandé de la surveiller au moins annuellement dans les cas simples ou plus souvent chez les patients à risque. Ainsi, la Société Européenne de Cardiologie recommande cette surveillance de façon systématique trois fois par an.

Il est impératif de connaître la fonction rénale lorsque le patient traité se présente dans une situation à risque (hémorragie active ou acte invasif urgent).

Données pharmacologiques et interprétation des tests d'hémostase :

  XARELTO PRADAXA
  Rivaroxaban Dabigatran etexilate
     
Mode d'action Anti-Xa Anti-IIa (antithrombine)
     
1/2 vie 8-13h 11-14h
     
Biodisponibilité Elevée (80%) Faible (6%)
     
Elimination rénale (33%), fécale (65%) fécale (20%)
     
CMAX 200 ng/ml (22-535) 175 (117-175 ng/l)
     
CRES (12h après prise) 32 ng/ml (6-239) 91 (61-143 ng/l)
     
TQ (temps de quick)

Allongement linéaire du TQ, INR < AVK

(ne doit pas être utilisée)

? variable (réactif), proportionnel à la concentration

     
TCA (Temps de céphaline activée)

Allongement modéré, non linéaire, variable

(x 1.5 - 2.5) < HNF

? variable,relation avec la concentration non linéaire

     
TT (temps de thrombine) Non modifié ? linéaire à 120 sec (Cres)
     
Temps de reptilase Non modifié Non modifié
     
Fibrinogène Non modifié Sous-estimé (Clauss)
     
D-dimères Pas d'interférence Pas d'interférence
     

Facteurs II, V, VII, X

Facteurs VIII, IX, XI , XII

Sous-estimé à CMAX, ok si dosage avant prise (CRES)
Sous-estimé
     
Cofacteur de la ristocétine (vWFRco), vWFAg Pas d'interférence Pas d'interférence
     
Facteur XIII   Sous-estimé
     
ACC (anticoagulant circulant), TCA ?, faux + ?, faux +
     
DRVV ?, faux + ?, faux +
     
Anticardiolipine, anti-béta2 GP1 Pas d'interférence Pas d'interférence
     
Protéine C et S Perturbé, surestimation Perturbé, surestimation
     
Antithrombine III Surestimation si test utilisant inhibition Xa Surestimation si test utilisant inhibition de thrombine
     
Résistance à la Protéince C activée perturbé perturbé
     
Génotypage : facteur V Leyden, Prothrombine polymorphisme 20210 A/G Pas d'interférence Pas d'interférence
     
Méthodes de dosage Activité anti-Xa avec calibration spécifique

Temps de thrombine dilué

Test chromogénique : temps d'écarine > test chronométrique (TT) (+++)

Test réalisable au Centre Biologique    
      
  tests perturbés ou ininterprètables
      
  résultats utilisables sous certaines conditions
      
  Pas d'interférence

Conduite à tenir en cas d'urgence chirurgicale ou d'hémorragie :

Le GIHP (Groupe d’Intérêt en Hémostase Péri opératoire) a élaboré une stratégie d’intervention en cas d’urgence chez un patient traité au long cours par Pradaxa° ou Xarelto° en fonction du dosage, ainsi qu’une procédure dégradée lorsque le dosage n’est pas disponible immédiatement4,8.

Interactions médicamenteuses :

4 types d’interaction à prendre en compte :

1- sur l’hémostase (interaction pharmacodynamique)

2- sur le métabolisme (interférence pharmacocinétique)

3- sur l’absorption (en particulier sur la pGP)

4- sur la métabolisation uniquement pour le rivaroxaban (en particulier sur la cytochrome P450 3A4

- Voir tableau sur article cité en référence9

Contre_indications7 et surveillance :

Contre-indication formelle des antifongiques azolés (kétonazole, itraconazole) et de la ciclosporine pour le Dabigatran (non recommandé pour le rivaroxaban), la surveillance clinique étroite pour les antiarythmiques cités, antiagrégants,antiépileptiques,antibiotiques (rifampicine et clarithromycine), le millepertuis, le ritonavir, les AINS.

A retenir :

- Les nouvelles héparines orales apportent un confort certain dans les indications proposées par l’ANMS

- Leur mode d’action est de deux ordres : anti-thrombinique et anti-Xa

- Il n’y a pas d’antidote

- la posologie est unique,  et dépend de la fonction rénale, évaluée par la formule de Cockroft, à vérifier au moins une fois (3 fois selon société de Cardiologie) par an de ce fait, une attention particulière doit être portée sur la compliance et les médications associées.

- l’INR ne doit pas être utilisé pour la surveillance

- Le bilan d’hémostase pré opératoire n’est pas interprétable ou seulement sous certaines conditions

- En cas d’hémorragie ou d’intervention en urgence, des mesures ont été préconisées par le GIHP8.


Docteur Eric GAEREMYNCK 
Médecin Biologiste - Responsable Hémostase

 

Pour en savoir plus :

1 http://site.geht.org/site/Pratiques-Professionnelles/Nouveaux-anticoagulants-oraux_96_.html

2 http://site.geht.org/site/Pratiques-Professionnelles/Nouveaux-anticoagulants-oraux/Dabigatran-et-tests-biologiques_96_819.html

3 http://site.geht.org/site/Pratiques-Professionnelles/Nouveaux-anticoagulants-oraux/Rivaroxaban-et-tests-biologiques_96_778.html

4 http://site.geht.org/site/Pratiques-Professionnelles/Nouveaux-anticoagulants-oraux/Propositions-du-GIHP-NACO-et-Urgences-fevrier-2013_96_810.html

6 http://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/901e9c291a545dff52c0b41365c0d6e2.pdf

7 J-P Laroche, J-M Juliard, E. Touzé, J-M Pernès, L. Drouet « Nouveaux anticoagulants dans la prise en charge de la pathologie thrombo embolique veineuse et du risque thromboembolique de la fibrillation atriale non valvulaire : devoir d’information ». Sang Thrombose Vaisseaux 2012 ;24, (6) : 261-5 doi :10.1684/stv.2012.0713.

8 P. Sié, C.M. Samama,A.Godier,N.Rosencher,A.Steib, J.-V. Llau, P.van der Linden, G.Pernod, T.Lecompte, I. Gouin-Thibault, P. Albaladejo. « Chirurgie et actes invasifs chez les patients traités au long cours par un anticoagulant oral anti-IIa ou anti-Xa direct. Actualisation 2012. Propositions du GIHP (Groupe d’Intérêt pour l’Hémostase Périopératoire) et du GEHT (Groupe d’Etude de l’Hémostase et des Thromboses)- Annales Françaises d’Anesthésie et de Réanimation 2011 ;30 :645-650.2011.

9 Pernod G, et al. « Questions-réponses sur l’utilisation de rivaroxaban pour le traitement de la maladie thromboembolique veineuse ». J Mal Vasc (2012), http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2012.09.003

 

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